[Rétrospective Thèmes] Les origines de l’alchimie

Les origines de l’alchimie

( Souvenir du 23 JUIN 2017 )

Les origines de cette science philosophique semblent être majoritairement arabes. Le nom « El-Kimyâ » provient de Kimyâ, qui dériverait de Khem « le pays noir », à savoir l’Egypte dans l’Antiquité. Al-kymya’ pourrait aussi signifier en arabe ancien « science des quantités ». Ce qui n’est pas étonnant quand on sait à quel point l’alchimie doit être minutieuse dans ses mesures et la quantification de ses ingrédients. Le mot « kymya » arabe a donné le mot actuel « chimie » et ne dit-on pas que l’alchimie est l’ancêtre de la chimie?

Cette origine arabe est également attestée de façon livresque du fait que le texte considéré comme fondateur, la Table d’Emeraude (dont nous aurons l’occasion de reparler ultérieurement) nous est parvenu par une source arabe. La plus ancienne version connue se trouve en appendice d’un traité arabe du VIe siècle, le Livre du secret de la Création, Kitâb sirr al-Halîka (et dont on a une copie datant de 825). Ce texte se présente comme une traduction du grec d’Apollonius de Tyane, sous son nom arabe Balînûs. L’hypothèse d’un original grec (peut-être du IVe siècle) est vraisemblable, même si aucun manuscrit n’a été retrouvé ; l’attribution à Apollonius, quoique fausse (pseudépigraphique), est courante dans les textes arabes médiévaux de magie, d’astrologie ou d’alchimie.

Serge Hutin indique, dans son ouvrage « l’Alchimie » paru au PUF en 1951 (2011 pour la 12e édition) que les sources principales livresques sont « d’abord les traductions latines des écrits arabes, apparues en Occident vers le XIe siècle ». Cependant, selon lui, ces écrits seraient entièrement inspirés de manuscrits grecs.
Néanmoins, d’autres hypothèses de sources ne sont pas négligeables: en effet, des pratiques et pensées de type alchimique auraient existé en Chine dès le IVe siècle av J-C et en Inde dès le VIe siècle avant J-C. Quant à l’alchimie occidentale, on la retrouve vraisemblablement dans l’Egypte hellénistique des Ptolémées entre -100 et 300. Théophraste, philosophe grec du IVe siècle av J-C peut être considéré comme tel (cf. « Le Traité des Pierres ») Sur l’origine indienne de l’Alchimie, voici l’article prévu par Universalis.fr : http://www.universalis.fr/encyclop…/…/3-l-alchimie-indienne/

Au final, nous ne saurons jamais avec certitudes quelles sont les origines réelles et concrètes de l’Alchimie, qu’elle soit philosophique ou expérimentale. Nous savons d’où nous provient l’Alchimie occidentale telle que nous la connaissons aujourd’hui, mais nous ne savons pas où elle a pris racine à l’aube de l’Humanité. Ces racines se perdent sans doute dans la nuit des temps où la connaissance, considérée comme sacrée, n’était transmise que de façon orale, à la manière des druides celtes.

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[Rétrospective]  Le Principe du Masculin et du Féminin

 

SOUVENIR DU 30 JUIN 2017

Nous apprendrons avec le temps et l’étude approfondie de la philosophie hermétique, que le Grand Oeuvre, sa Voie initiatique et son fondement, est hautement « sexuée ». Attention à la définition du terme que vous aurez l’occasion de nuancer.

Comme dans la Nature, il faut un principe mâle et principe femelle pour que la Vie et la Création soit possible. Le très excellent et très recommandé commentaire des planches du Mutus Liber disponible à cette adresse ne peut nous autoriser à passer outre cet élément fondamental.

http://www.archives-dossiers-secrets.fr/forum/viewtopic.php…

En effet, Serge Hutin, dans son ouvrage « l’Alchimie » paru aux PUF dans la collection Que sais-je? nous propose ce tableau qui montre comment les symboles et les principes que nous retrouverons dans les étapes de la voie hermétique se décomposent selon le principe du masculine et celui du féminin:

Mâle Femelle
Sperme Menstrue
Actif Passif
Forme Matière
Âme Corps
Feu Eau
Chaud-sec Froid-humide
Soufre Mercure
Or Argent
Soleil Lune

Nous aurons, sans doute, l’occasion d’y revenir. Mais il semble important de noter que pour entreprendre un cheminement spirituel et alchimique, ces deux principes doivent s’être trouvé et avancer en complémentarité. Il s’agit d’une Voie vers une Vérité intérieure et personnelle ultime que l’on accomplit pour soi mais main dans la main avec l’autre. Citons par exemple Carthoris pour son étude des planches dans le site pré-cité: « Nous sommes ici en fait devant l’un des grands secrets rituels du la voie tantrique à deux.

Dans de nombreuses gravures alchimiques de la Renaissance et du grand siècle, nous voyons bel et bien apparaître un homme portant un costume antique spécial et dont la tête se trouve surmontée d’une sorte de couronne métallique en forme de soleil rayonnant, tandis que ; la femme lui faisant face porte au contraire un diadème en forme de croissant lunaire. L’un figure Apollon, l’autre Diane. En fait, il ne s’agit pas du tout d’une simple, allégorie mais d’une réalité très concrète : le couple tantrique en train d’exécuter, avant la réalisation effective des noces chimiques, une sorte, de danse rituelle symbolisant le rapprochement magique qui doit s’opérer entre les deux natures divines opposées mais complémentaires. »

 

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Compte-rendu de lecture sur l’ouvrage de Jacques Van Lennep « Alchimie. Contribution à l’histoire de l’art alchimique » Bruxelles, 1984 – réédition revue et augmentée en 1985. Publié avec le concours de la Fondation universitaire de Belgique.

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C’est bien la première fois que je m’apprête à faire un compte-rendu tandis que je n’ai pas encore fini l’ouvrage. Appelons alors plutôt cela une « présentation » de cette mine d’or encyclopédique. Je le lis en fil rouge, en parallèle de mes autres lectures car l’ouvrage est de taille, au sens propre, comme au sens figuré : le l’imposant livre mesure 22 cm de large sur 30 cm de long. Il se compose de 468 pages de textes et illustrations (au nombre de 1015) et comporte également un répertoire des signes alchimiques, une bibliographie profuse et un index symbolique et mythologique.

Sa première édition a été publiée à l’occasion de l’exposition « Alchimie » réalisée à l’initiative du Crédit Communal de Belgique. Sur le net, nous trouvons peu d’informations à ce sujet, si ce n’est que, bien qu’elle fût inattendue, elle sembla séduire le public car près de 100 000 visiteurs vinrent à la rencontre du large choix de manuscrits, livres anciens, tableaux et également de la reconstitution d’un cabinet d’alchimiste, du 19 décembre 1984 au 10 mars 1985. (Etais-je seulement né(e) ?) ( http://www.persee.fr/d…/rnord_0035-2624_1985_num_67_264_4109 ) Bruxelles n’est pas étrangère à l’alchimie, elle en est même l’une des places fortes en Europe, il suffit de se promener sur la Grand Place dorée aux divers symboles éloquents pour s’en rendre compte. Il n’est donc pas surprenant qu’une telle exposition y ait vu le jour.

Je ne sais plus qui m’avait recommandé l’acquisition de cet ouvrage, et je l’en remercie. Il est en effet nécessaire dans la bibliothèque d’un néophyte car il nous propose une large présentation de l’alchimie, de son histoire, par ses manuscrits et son symbolisme visuel. Il permet de se familiariser avec les termes les plus récurrents et de découvrir les personnalités et les ouvrages clés de notre Art. Sans entrer dans des détails techniques, scientifiques ou purement opératifs, Jacques Van Lennep nous présente en toute simplicité et de façon encyclopédique, les différents manuscrits qu’il a pu étudier, photographier et consulter. Ce catalogue est précieux pour toute personne -comme moi- ne sachant la procédure pour demander à consulter ces manuscrits de visu, en réel.

« L alchimie, mythe ou réalité ? L’alchimie, science ou sagesse ? Il faut être un « honnête homme » particulièrement cultivé pour se poser la question en ces termes. » Commence la préface proposée par François Narmon, Président du Comité de direction du Crédit Communal de Belgique. Et notre auteur l’est tout particulièrement quand on voit l’aisance avec laquelle il nous présente les divers sujets abordés, avec moult notes explicatives et bibliographiques.

« […] Depuis 1966, [note personnelle : date à laquelle Jacques Van Lennep avait publié son essai « Art et Alchimie »] les recueils d’images alchimiques livrées dans le désordre, les fac-similés ou rééditions avec ou sans commentaires, se sont multipliés. Cependant, le progrès le plus notoire tient à une succession de thèses centrées sur l’iconographie ou qui permettent d’en affiner l’approche. Citons entre autres, celles de De Jong, Buntz, Dixon, Bergman, Rebotier, Telle, Gagnon, Obrist, Duval, Kirsop et Halleux. Ces études qui envisagent tantôt un aspect ou un traité particulier, tantôt une période limitée, ont accompli une percée universitaire qui nous assure que, désormais, l’alchimie et son art seront considérées comme un fructueux champ de recherches.
Cette situation et l’opportunité qui nous a été offerte nous ont incité à réexaminer in extenso notre sujet, en y incluant un aperçu des recherches que nous n’avions pu publier en 1966. Nous espérons que cette vision d’ensemble de l’art alchimique et des problèmes qu’il soulève, contribuera à suggérer de nouvelles voies d’exploration. » Nous explique Jacques Van Lennep dans son introduction.

Je ne m’étendrai pas plus sur ce compte-rendu. Pour ma part je le trouve complet, bien fait et traitant vraiment de façon globale l’ensemble de l’iconographie alchimique. J’ai appris des choses, j’en ai revu d’autres et cela m’a permis de « globaliser » l’ensemble des connaissances que j’ai pu croiser jusqu’ici. Je le finirai prochainement mais au vu de sa truculence, on ne peut le lire d’une traite sans que cela semble indigeste, même si le style de l’auteur est agréable. La présentation typiquement années 70/80 peut dérouter quelque peu car certaines pages sont de véritables blocs et les images ne figurent pas toujours aux pages où elles sont citées, néanmoins, cela reste, à mes yeux, un ouvrage de référence.

Pour aller plus loin, voici une présentation plus personnalisée par Pierre Julien, dans Revue d’Histoire de la Pharmacie Année 1985
http://www.persee.fr/…/pharm_0035-2349_1985_num_73_266_2362…

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Art et alchimie. Van Lennep (Jacques) : Alchimie. Contribution à l’histoire de l’art alchimique. Bruxelles, Crédit communal de Belgique (bd Pachéco, 44, 1000 Bruxelles), 1984, in-4°, 448 p., très nombr. ill. n. et coul. Ce gros et remarquable volume a paru à l’occasion de la grande exposition, première du genre, qui s’est tenue sur le sujet, à Bruxelles, grâce au Crédit Communal de Belgique, du 19 décembre 1984 au 10 mars 1985. Connu par ses articles sur l’art alchimique et par son livre de 1966 Art et Alchimie, réimprimé en 1971 et épuisé, J. van Lennep s’est proposé, dans ce nouvel ouvrage, de reprendre tout le sujet compte tenu de ses propres recherches et des publications universitaires récentes sur l’iconographie alchimique, de « rassembler l’essentiel de cette iconographie et d’en tenter l’interprétation ». Tâche d’une rare difficulté, ne serait-ce qu’en raison du foisonnement des images, parfois indépen- LE MOUVEMENT HISTORIQUE 275 dantes du texte auquel elles correspondent, de la « polyvalence symbolique des éléments iconographiques » et de la « polyvalence iconographique des produits ou opérations alchimiques ». Après un premier chapitre d’introduction, l’auteur traite des images des manuscrits. Les plus anciennes représentations symboliques connues (autres que d’appareils de laboratoire) ne remontent qu’au dernier quart du XIVe siècle, même si elles relèvent d’une tradition bien antérieure. Les manuscrits aux peintures les plus marquantes sont le Livre des secrets de ma dame Alchimie, de Constantinus, et un traité de Gratheus, tous deux en néerlandais (Bibl. Nat. Vienne) ; V Aurora consurgens (Le Lever de l’Aurore) aujourd’hui à Zurich et provenant de l’abbaye de Rheinau (lre décennie du XVe siècle) ; un Buch der Heyligen Dreyfaldekeit (Livre de la Sainte Trinité) du Germanisches Nationalmuseum de Nuremberg ; des Opera chimica pseudo-lulliennes, vers 1470-1475 (Bibl. Nat. Florence) ; le fameux feuillet des Remontrances de Nature à l’Alchimiste errant (Bibl. Marmottan) jadis attribué à Jean de Meung et restitué par A. Vernet à Jean Perréal ; un De Alchimia du XVIe siècle acquis de la reine Christine de Suède par Isaac Vossius, conservé à Leyde et riche de 121 dessins aquarelles ; le Splendor solis de Salomon Trismosin, à Berlin, dont les resplendissantes miniatures justifient bien le titre. Autant de « moments représentatifs de l’histoire de l’art et, par la spécificité de leur inspiration, de références exemplaires de l’art alchimique ». L’illustration y apparaît formée d’images spécifiques où l’alchimie est « désignée clairement par des objets qui lui sont particuliers » (comme le vase contenant une figure symbolique), d’images d’emprunt (religieuses ou mythologiques principalement), enfin d’images apparemment conventionnelles, en fait propres à l’alchimie, mais dépourvues du caractère répétitif attaché à la première catégorie. Chapitre suivant : Le grand-uvre gravé. L’illustration alchimique dans les ouvrages imprimés commence par des scènes de laboratoire et des vases, fourneaux et autres instruments. Les figurations symboliques se développent au XVIe siècle (Pretiosa Margarita Novella, 1546 ; Rosarium philosophorum, 1550), mais relèvent encore de l’imagerie médiévale. L’expansion de l’imprimerie, l’influence des recueils d’emblèmes et des Stammbùcher ou Album amicorum conduisent à l’âge d’or du premier quart du XVIIe siècle dans les régions germaniques avec les éditions du médecin Michel Maier, en particulier ses Symbola aureae mensae duodecim nationum (1617) et surtout son Atalanta fugiens (même année), « essai d’uvre totale » associant texte, image et musique et à une multiplicité d’autres ouvrages. Le chapitre IV est consacré à l’art monumental (architecture, sculpture, peinture murale, vitrail) : Notre-Dame de Paris, Notre-Dame d’Amiens, les arches du cimetière des Innocents et autres travaux de Nicolas Flamel, le palais de Jacques Cur à Bourges, le château du Plessis-Bourré et son plafond, l’Hôtel Lallemant de Bourges, le plafond du château de Dampierre-sur-Boutonne, la Porta alchimica de Rome. Il se termine par un très justifié appel à la prudence quant au caractère alchimique de monuments ou décorations pour l’identification desquels les documents font défaut. 276 REVUE D’HISTOIRE DE LA PHARMACIE De tout temps un lien étroit a existé entre l’art pictural et la recherche hermétique. Le chapitre V en témoigne, où l’auteur montre les rapports suivis entre les techniques artistiques de la peinture à l’orfèvrerie et l’art alchimique : ne doiton pas à l’alchimiste Jean van Êyck la découverte d’un nouveau procédé de peinture à huile ? Le peintre-graveur Francesco Mazzola dit le Parmesan a été obsédé par l’alchimie. Le thème de la Mélancolie traité par Durer et d’autres est très marqué par l’hermétisme, cependant qu’à Reims le tableau de la Vierge alchimique (XVIIeXVIIIe siècle), jadis en l’église Saint-Maurice, aujourd’hui au Musée des BeauxArts, relève d’un ésotérisme alchimico-maçonnique. Quant à Jérôme Bosch, d’une analyse approfondie des Noces de Cana, du Jardin des Délices et de la Tentation de saint Antoine, l’auteur conclut que les références à l’alchimie dans ces uvres « sont trop nombreuses, trop précises et trop intelligemment agencées pour être les fruits du hasard. La prodigieuse faculté de Bosch à manipuler des symboles qui n’étaient sans doute connus que des initiés, à les exprimer par les signes les plus adéquats, conformes à la doctrine, n’est pas le propre d’un esprit indifférent. Cela met hors de doute que Jérôme Bosch ait été instruit en profondeur de la philosophie hermétique, dans ses intimes subtilités et rapports avec un certain humanisme ». Ce qui ne signifie pas que son uvre entière s’explique par la seule alchimie. Nombre d’artistes, après Bosch, en « recopièrent les arbres creux, les matras, les cucurbites, les ufs, les vaisseaux, les sphères, les athanors ». Seul Pierre Breughel l’Ancien « témoigna d’un véritable ésotérisme ». De lui, van Lennep examine plus particulièrement la série des Vices (ou Péchés capitaux), où les symboles alchimiques sont nombreux (alors qu’ils sont rares dans les Vertus), la Dulle Griet, V Alchimiste, la Résurrection du Christ, la Chute d’Icare et le Misanthrope. Dans Y Alchimiste, il ne faut pas voir, selon lui, une satire de l’alchimie, mais « l’expression de la condamnation d’un charlatan [le misérable laborant identifié au souffleur] par l’alchimiste [l’adepte ou philosophe assis au pupitre] » et aussi « celle d’une plainte inspirée par la pauvreté qui guettait le disciple d’Hermès ». Et la Chute d’Icare réunit tous les éléments d’une « éblouissante synthèse de la philosophie hermétique. Elle intègre les recherches de l’adepte au sein du cosmos, rassemble les phases de son uvre dans un contexte moral et caractérise le but final de sa science ». Un dernier chapitre est voué aux arts du feu : métallurgie, céramique, verrerie, toutes trois intimement liées à l’alchimie dans leur développement. En témoignent, entre autres, pour la première, la participation de maints alchimistes à la fabrication de monnaie et les médailles commémoratives de prétendues transmutations, pour la seconde l’invention de la porcelaine dure européenne par Bôttger. Enfin, en conclusion, l’auteur dépeint à grands traits le devenir de l’alchimie dans la littérature et l’art plastique, son passage à une dimension mythique, depuis sa destitution par la chimie au XVIIIe siècle. Impossible en un si court espace de donner de cet ouvrage un résumé qui reflète convenablement l’extrême et foisonnante richesse de son contenu. Tout au long de ces 420 pages, selon une disposition que l’on aimerait plus répandue, le texte, serré LE MOUVEMENT HISTORIQUE 277 et composé en petit corps, chemine de concert avec une foule d’illustrations j’en compte plus de 800 en noir et une vingtaine en couleur et avec une abondance de notes et références portées en marge. Facilitant les recherches ponctuelles, un index symbolique et mythologique s’ajoute à celui des noms de personnes et titres d’uvres. Bien que l’ouvrage soit déjà littéralement bourré de références bibliographiques, j’incline à regretter que l’auteur n’ait pas davantage étendu son information à l’histoire de la pharmacie et de la médecine. Il me paraît aussi avoir de l’alchimie une conception extensive qui limite singulièrement le champ de la chimie (ou pré-chimie, si l’on veut). Quoi qu’il en soit, même si certaines de ses thèses seront sans doute discutées par de plus compétents que le signataire de ces lignes, il n’y a nul doute que ses mises au point, comme sur le prétendu Basile Valentin ou sur le cas Flamel, sont de celles dont on ne pourra plus se passer. Nul doute non plus que l’ouvrage dans son ensemble constitue une étude fondamentale et un incomparable instrument de référence. Pierre Julien.

 

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La page fête ses deux mois!

La page Facebook https://www.facebook.com/alchimieauquotidien/ fêtait ses deux mois d’existence hier, sa soixantaine d’articles et ses quasiment 200 abonnés!

Je vous en remercie chaleureusement, c’est une belle expérience que je vis grâce à vous et grâce à notre Science.

J’apprends, j’évolue, je découvre les joies du partage et pour tout ceci: un grand Merci!

Mes amitiés,
Charlisban

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Compte-rendu de lecture sur Les Douze Clefs de Philosophie de Frère Basile Valentin

J’ai profité d’avoir un peu de temps devant moi pour attaquer l’un des multiples PDF que je m’étais laissé sous le coude et j’ai souhaité commencer par les douze clefs de philosophie de Basile Valentin.
Bien que je m’intéresse à l’Alchimie depuis quelques années déjà, je m’y étais toujours intéressé de loin, par sa symbolique médiévale fascinante et par ses concepts spirituels avant tout. J’ai décidé cette année, et avec la création de cette page, de me confronter aux textes et de mettre en application le fameux précepte « lege, lege, relege, ora, labora et invenies ».

Le PDF dont je dispose, vous le trouverez à cette adresse : http://theudericus.free.fr/…/Alchimie_Basile_Valentin_Les_d… // La traduction est dite « Traduction Françoise, A Paris, chez Pierre Moët Libraire, 1660 »

Après des discussions constructives sur facebook, je remercie Joël Tétard pour ses éclaircissements, il s’avère que cette édition/ traduction n’est pas celle utilisée par Eugène Canseliet, dont je ne saurai me priver de vous partager la référence, qui est bien plus fiable http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Douze_clefs_de_la_p…

D’autant plus que sur ma version PDF je n’ai pas eu accès aux fameuses planches symboliques qui accompagnent le texte.
En effet, sur le document que j’ai utilisé, la traduction semble correcte mais comporte de très nombreuses fautes de grammaire et certaines phrases ne tiennent pas tout à fait debout. Cela ne gêne en rien la lecture qui reste au demeurant fort agréable, ni la compréhension du message de Frère Basile Valentin. Ainsi, je laisserai les copier/coller tels quels sans correction et je ne serai pas responsable des fautes (parfois atroces) qui s’y trouvent.

Vous trouverez d’autres PDF à ces adresses, mais je ne les ai pas imprimés et n’ai donc pas pu travailler dessus : http://livres-d-hermes.com/PDF/LDCLEF01.PDF // https://warburg.sas.ac.uk/pdf/fgh4910b3194762.pdf et celui de la bnf http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k650023/f356.item

« Premier livre de la clavicule de la pierre précieuse des anciens philosophes » AVANT PROPOS
Il serait intéressant d’étudier plus en détail le lien entre le mot « clavicule » employé ici et le mot « clef » du titre de l’ouvrage. Peut-être que l’étymologie est la même. Dans son avant-propos Frère Basile Valentin nous avertit sur les difficultés de partir en quête de la Pierre Philosophale et nous indique la prédisposition d’esprit dont il faut faire preuve pour parvenir à trouver ce que le Cherchant cherche.
« Outre plus, ne méprise pas les livres des anciens Philosophes, qui pour le certain ont eu la Pierre devant nous, mais lis-les entièrement, car après Dieu ce sont ceux-là qui sont causes que je l’ai eut, lis les plus d’une fois, afin de n’oublier les principes, que les fondements te tombent, et que la lumière de la vérité ne soit éteinte. »

Ils nous y présente les trois principes que nous connaissons à présent bien :
« Quand ces trois principes sont joints ensemble par vraie union, ils sont par continuation de temps, et par le moyen du feu dûment appliqué, une substance sensible ; savoir est, la Mercuriale, la Sulfureuse et la Saline, que Hermès et tous les autres devant moi, ne pouvant par delà dès le commencement du Magistère, ont appelé les trois principes, lesquels s’y étant mis proportionnellement, l’on coagule, selon les diverses opérations de nature, et la disposition de la semence, ordonnée de Dieu à cet effet. »

A la 6ème page de cette retranscription du texte, l’auteur nous présente, sous l’allégorie mythologique des Dieux Latins conjoints aux planètes qui y sont liés, les différents métaux qui seront rencontrés lors du Magistère : « La Lune a en soi un Mercure fixe… » « La lascive Venus est bien colorée… », « Le sel fixe, fournit au guerrier Mars un corps dur, fort, solide et robuste… » Il nous explique ensuite, toujours de façon allégorique, la façon dont on devra procéder aux noces chymiques : « L’on mena cette eau au Dieu Mercure son père, pour être examinée, et la voulut épouser, et de fait l’épousa, et se fit d’eux une huile incombustible, puis Mercure devint si orgueilleux et superbe, qu’il ne se reconnu plus pour soi même, mais ayant jeté ses ailes d’Aigle, il dévora sa queue glissante d’un dragon, et déclara la guerre à Mars, incontinent Mars ayant assemblé sa compagnie de chevaux légers, fit prendre Mercure, le mit prisonnier, et constitua Vulcain pour Geôlier de sa prison, jusqu’à ce qu’il fut derechef délivré par le sexe féminin. »

Le phrasé souple et léger, conjoint aux évocations mythologiques, toute cette cosmologie allégorique, m’ont beaucoup parlé, étant littéraire de formation, cela m’a bien permis de m’accoutumer au parler hermétique que je n’aurais de cesse de croiser sur mon chemin.

Entrons à présent dans le vide du sujet et lisons studieusement les douze clefs que l’auteur nous propose dans chacun des 12 chapîtres du Livre Second:
LIVRE SECOND
CONTENANT LA PREMIERE CLEF DE L’OEUVRE DES PHILOSOPHES
CHAPITRE I
De la préparation de la première matière.

Frère Basile Valentin nous y avertit sur la qualité des métaux à utiliser et nous conseille de bien nous garder des faux métaux que nous pourrions rencontrer. Cette matière vile doit être purgée et nettoyée de même que nos âmes. Tout au long de cette première clé, nous retrouvons l’allégorie du Loup et du Lion qui se combattent. Le loup représente généralement l’antimoine et le lion représente le fixe, le soufre. Quand il a des ailes, le mercure. Il peut également représenter le vitriol.

Il conclut sa première clef ainsi (et si quelqu’un a trouvé trace de ce Luce Papirus cela m’intéresse)
« Si tu entends ce que je viens de dire, tu as ouvert la première porte de la première Clef, tu as passé la première barrière, mais si tu n’y voies encore goutte, et ne vois aucune clarté, tu auras beau manier et regarder le verre, cela ne te servira de rien, et ne t’aidera aucunement la vue corporelle pour trouver à la fin ce qui te manquera au commencement, car je ne parlerai pas d’avantage de cette Clef, comme m’a enseigné Luce Papirus. »

Ainsi défilent les douze clefs, qui sont concluent par un poème en vers « de la première matière de la Pierre des Philosophes »
Le Livre troisième contient « une abrégée répétition de tout ce qui contenu dans les traités des douze clefs de la Pierre précieuse des Philosophes, dans laquelle est par le même Auteur Fr Basile Valentin mise en lumière : La lumière des Sages. » Ce livre est intéressant car il reprend et synthétise de façonn moins allégorique et plus accessible ce qui a été évoqué précédemment, mais sans entrer dans le détail (ce qui nous oblige à lire, lire et relire pour mieux comprendre) Il nous présente les trois principes de l’œuvre des Philosophes : le Mercure, le Soufre et le Sel. On y retrouve ensuite quelques recommandations notamment sur la façon dont l’Alchimiste doit prendre soin de son feu.

Ensuite, Basile Valentin nous propose un colloque de l’esprit de mercure à Frère Albert.
Je ne sais pas qui est Frère Albert ou s’il en est fait mention quelque part dans l’œuvre de Basile, je ne sais pas à qui il correspond où s’il est juste un personnage fictif employé dans le but de ce colloque.

Enfin, on trouve une explication de l’Esprit sur les qualités de la première matière.

J’ai beaucoup apprécié la lecture de cet ouvrage car j’aime beaucoup la langue de l’époque. J’ai apprécié les évocations mythologiques et les allégories culturelles qui sous-tendent le texte. J’y ai vu à quel point, en effet, l’alchimie s’appuie sur l’astrologie tant pour les étapes de l’œuvre que pour la symbolique qu’offre cette seconde science occulte. L’esprit s’exerce à tenter de comprendre les formulation équivoques, à faire une gymnastique avec les symboles déjà connus et les symboles qu’on ne connait pas encore et à tenter de décrypter un texte qui est, comme le dit Basile Valentin lui-même, incompréhensible à qui n’est pas digne de la Connaissance : « Et encore que je sache bien que beaucoup diront que j’ai tout plus que trop enseigné, et qu’à cause de cela j’ai chargé ma conscience de beaucoup de péchés, je leur répondrai néanmoins que cela est assez obscur aux ignorants et gens de peu d’esprit, mais clair et manifeste aux enfants de science. C’est pourquoi écoute et pèse bien mes paroles, et suis ce qu’ils t’enseigneront, tu parviendras aux plus cachés mystères de l’Art et de la Nature. »

Je recommande vivement la lecture de cet ouvrage que ce soit en début, en milieu ou en fin de parcours. Il n’est pas suffisamment clair pour être compris des néophytes comme moi, mais il l’est assez pour nous donner déjà quelques clefs, et il me tarde de pouvoir me procurer l’édition présentée et commentée par Eugène Canseliet afin de mettre plus en lumière tout ce que j’y ai lu.

La question que je me pose, et peut-être certains d’entre vous seraient éventuellement en mesure de m’aider, c’est que, vu que les manuscrits dateraient – de façon légendaire- du XV ème siècle et qu’ils auraient édités seulement à partir de 1602, avons-nous quelconque trace de ces éventuels manuscrits ? les planches ajoutées aux douze clefs sont clairement de facture XVIIe siècle et ne semblent donc pas d’origine, quelqu’un aurait des infos ?

les 12 clefs livre

Basile Valentin

Présenté par Serge Hutin dans l’Alchimie

« Il faut faire une place à part à Basile Valentin, qui aurait vécu dans un couvent de bénédictins à Erfurt vers 1413. Ses manuscrits, retrouvés, d’après la légende, dans l’église d’Erfurt après le bris d’une colonne par la foudre n’ont été imprimés qu’en 1602. Aussi beaucoup d’historiens le considèrent-ils comme un personnage mythique, et ses œuvres sont parfois regardées comme postérieures à Paracelse… Quoi qu’il en soit, ces ouvrages sont du plus haut intérêt ; on y voit, exprimée dans toute son ampleur, la conception gnostique de l’alchimie. On y trouve également la description de corps chimiques nouveaux, comme l’antimoine, et l’utilisation de nombreux procédés, comme l’emploi de la baguette divinatoire pour découvrir les métaux cachés au sein de la terre. Diverses Œuvres de Basile Valentin, notamment ses célèbres Douze Clefs, sont illustrées de curieuses planches symboliques ».

Pour une présentation plus académique et nous présentant ce qui pourrait constituer la véritable identité de Basile Valentin « Johann Thölde » voyez wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Basile_Valentin

Chymische_Schrifften_1717_Basilius_Valentinus_Frontispiece (1)
Pour un descriptif plus ample de Basile Valentin, je vous laisse avec cette article : http://www.martiniste.org/textes/basile-valentin.html

Serge Hutin

En 1602 paraissait une série de traités alchimiques signés Basile Valentin. Ces ouvrages, dont le principal s’intitulait les Douze clefs de la philosophie, demeurent à juste titre parmi les plus réputés des livres jamais écrits par les « amoureux de Science ». Ils n’ont cessé d’être réédités jusqu’au XXe siècle inclus. Citons l’admirable édition française, enrichie de savants commentaires, que l’alchimiste contemporain Eugène Canseliet (fils spirituel de l’énigmatique Fulcanelli, l’auteur du Mystère des cathédrales et des Demeures philosophales) avait donnée en 1953 aux Éditions de Minuit. Signalons aussi le petit volume (mince par l’étendue, mais au texte d’une rare et riche concision) intitulé Révélation sur le mystère de la teinture des sept métaux, réédité aux Éditions “Psyché”. Cet ouvrage comportait un frontispice symbolique – figurant “voie sèche” (au creuset) et “voie humaine” (à la cornue) avec deux personnages : Hermès Trismégiste (le “trois fois grand”), le fondateur légendaire de l’alchimie dans l’Égypte ancienne ; Basile Valentin lui-même, vêtu de sa robe monacale.

On ne sait rien de précis sur la vie de Basile Valentin, sauf qu’il était vers 1413 religieux au couvent des bénédictins d’Erfurt. Malheureusement, aucune pièce d’archives, nul document d’époque n’a pu être découvert à ce jour sur ce personnage. D’où l’hypothèse – soutenue par certains historiens de l’alchimie – suivant laquelle le véritable auteur des traités aurait vécu à une date bien plus tardive, peut-être en 1602 seulement. La découverte des manuscrits ne se trouvait-elle pas présentée comme survenue à la suite d’un “hasard” par trop miraculeux ? Le premier éditeur des œuvres signées Basile Valentin racontait en effet la fort curieuse histoire que voici : les manuscrits venus en sa possession avaient été découverts, nous contait-il, lors du bris par la foudre d’une colonne de l’église principale d’Erfurt. On s’aperçut que, dans cette colonne (qui était creuse), avaient été placés des manuscrits alchimiques, tous l’œuvre d’un moine de l’abbaye y ayant vécu au tout début du XVe siècle.

En fait, l’existence historique de Basile Valentin ne nous semble nullement invraisemblable : à la fin du Moyen Âge, fort nombreux étaient les moines qui pratiquaient l’alchimie dans leur cellule. Quant à l’histoire de la “cache” des manuscrits, elle s’insérait fort bien dans toute une tradition : il existe une série de cas, dûment authentiques eux, d’alchimistes ayant utilisé des cachettes, parfois inattendues, pour y dissimuler leurs manuscrits ou même, parfois aussi, une réserve de “poudre de projection”. Il y a l’histoire – qui, si elle fut reprise dans le roman de Gustave Meyrink “L’ange à la fenêtre d’Occident”, exista bel et bien dans la réalité – des deux boules trouvées par des pillards dans le tombeau d’un évêque du Pays de Galles et parvenues en la possession d’Édouard Kelley, l’ami du magicien et alchimiste John Dee. Même l’étrange deus ex machina constitué par le bris providentiel d’une colonne par la foudre n’est pas forcément une invention. Il arrive à avoir lieu ! L’histoire de la colonne brisée par la foudre nous ferait penser, par exemple, à cette découverte en Angleterre, au début des années 70, de toute une collection d’enseignements secrets de la fraternité de l’Aube dorée (Golden Dawn) : ces manuscrits furent découverts, tombés sur la grève, lors de l’effondrement du bord de la falaise où se trouvait bâtie (elle remontait à l’époque victorienne) une maison depuis longtemps abandonnée…

On remarquera que le nom profane du personnage – qu’il s’agisse effectivement d’un moine médiéval de l’abbaye d’Erfurt ou de quelqu’un qui aurait vécu, lui, à une date plus tardive – nous demeure inconnu. “Basile Valentin”, c’est un nomen symbolique – qu’il faudrait comparer, pour l’époque contemporaine, à Fulcanelli, dont l’identité véritable demeurait cachée.
Usage commun aux alchimistes et à diverses fraternités initiatiques que de concrétiser ainsi la mort du vieil homme par l’adoption d’un nom symbolique. Dans le double patronyme “Basile Valentin”, on remarquera que le premier nom (du grec Basileus, “Roi”) nous pointe le couronnement de l’adepte, sa victoire, la réalisation du Grand Œuvre. Et Valentin nous évoquerait d’une part le saint de ce nom, patron des fiancés (mais les alchimistes ne sont-ils pas “amoureux de Science” ?), et d’autre part, le plus célèbre des docteurs du gnosticisme chrétien des premiers siècles.
Il va sans dire que le moine qui figure au frontispice du traité “Révélation sur le mystère de la teinture des sept métaux” – et bien que ce religieux alchimiste ait (avouons-le) le physique de l’emploi – est un portrait imaginaire, non l’effigie authentique de Basile Valentin.

*** L’alchimie, quête initiatique ***

L’examen des figures symboliques qui ornent les “Douze Clefs de la Philosophie” – bien que sans doute postérieures au texte, elles y “collent” si admirablement – nous fait déceler tout de suite les liens de la tradition alchimique à laquelle se rattachait Basile avec son message d’ordre spirituel et initiatique. C’est d’ailleurs à Basile Valentin qu’on doit la première révélation du mot code “Vitriol”.
Il ne s’agit pas du tout, dans cette acception, de l’acide sulfurique du commerce (dont vitriol est l’appellation vulgaire) mais d’une véritable clef initiatique : chacune des lettres V.I.T.R.I.O.L. est celle de l’un des mots successifs de la phrase latine Visita Interiora Terrae rectificandoque invenies occultum Lapidem, (Visite les parties intérieures de la Terre et en rectifiant tu trouveras la Pierre cachée). Découvrir la Pierre Philosophale, c’est opérer une descente dans les couches profondes de notre psychisme et, si du moins nous acceptons de nous purifier des composantes imparfaites (“en rectifiant”), y voir finalement luire le noyau lumineux, divin, qui se trouvait caché, obscurci, sali par les scories qui le masquent. C’est une autre forme donnée à l’adage traditionnel qui se trouvait inscrit au fronton du temple de Delphes, et que Socrate avait repris comme devise : “Connais-toi toi-même”. Autre formule cachée qui se trouve dans les écrits de Basile Valentin, et que reprendra Paracelse, ce grand médecin alchimiste de la Renaissance qui nommera ainsi son épée : Azoth. Ce mot réunit la première lettre (des alphabets latin : a, grec : alpha, hébreu : aleph) et la dernière dans les trois mêmes alphabets (latin : z, grec : oméga, hébreu : thau). Le commencement et la fin de toutes choses… conjonction des contraires et qui se trouve représenté en alchimie par l’androgyne hermétique (appelé en latin Rebis, littéralement “chose-deux”), tient d’une main l’équerre (symbole de la matière) et de l’autre le compas (symbole de l’esprit). Il convient de remarquer que l’équerre et le compas n’ont nullement été inventés par les corporations médiévales de bâtisseurs (la maçonnerie dite opérative, d’où devait sortir la maçonnerie spéculative) : on rencontre déjà ces symboles dans la tradition taoïste chinoise bien antérieure à l’ère chrétienne.

Dans les manuscrits alchimiques de Nicolas Valois, un adepte français à peu près contemporain du mystérieux Basile Valentin, on voit – notons-le – l’équerre et le compas figurés sur l’une des miniatures.

Mais Basile Valentin fait jouer aussi un rôle traditionnel au ternaire Soufre-Mercure-Sel. Il ne s’agit pas des corps usuels désignés par ces noms : le Soufre, c’est le principe masculin ; le Mercure, le principe féminin. Quant au Sel, c’est le troisième terme du ternaire : le principe qui permet d’opérer une conjoncture harmonieuse des contraires. D’où sa représentation par un prêtre qui célèbre le mariage d’un homme (symbolisant le Soufre) et d’une femme (qui représente le Mercure).

*** Secrets pratiques d’alchimie ***

Il faut bien remarquer que Basile Valentin, dans ses écrits, lie intimement – ce qui est tout à fait traditionnel – l’oratoire (l’ascèse, le grand œuvre spirituel) au laboratoire (le grand œuvre minéral) : l’un et l’autre s’impliquent, sont indissociables.
Basile Valentin a donné à l’un de ses traités le titre “Le Chariot triomphal de l’antimoine”. C’est d’ailleurs à lui qu’on attribue la découverte de ce corps (un métalloïde), auquel le vocable “antimoine” aurait été attribué à la suite du sort tragique connu par un religieux qui avait imprudemment essayé ses vertus médicales. Mais, comme toujours, lorsqu’il s’agit de traités alchimiques traditionnels, il ne faut jamais oublier de rappeler que le nom d’un corps peut fort bien désigner aussi tout autre chose que ce qu’il désigne dans le langage usuel.

Basile Valentin utilisait la baguette divinatoire (connue bien avant lui certes) pour rechercher les merveilles minérales – métaux et autres – cachées au sein de la terre. Remarquons d’ailleurs que c’est seulement ainsi qu’il s’avère possible d’expliquer l’étonnante justesse des forages miniers pratiqués au Moyen Âge. Un ami lyonnais nous relatait ainsi sa visite à une petite mine d’antimoine, ayant cessé d’être exploitée depuis l’époque de Jacques Cœur. Comment donc les mineurs du Moyen Âge avaient-ils pu tomber “pile” sur le gisement de ce corps assez rare ? Sans nul doute, pensons-nous, par la baguette divinatoire.

Dans le petit traité “Révélation sur le mystère des teintures des sept métaux”, Basile Valentin use pour désigner l’alchimie de l’expression – curieuse à première vue – d’“art de musique”. Et ce n’est nullement un hasard si le réalisateur du frontispice symbolique y a dessiné des instruments de musique. Que voulait donc dire cette expression : “art de musique” ? Rappeler cette vérité magique fondamentale : l’accès par l’alchimiste opératif à une connaissance directe, vécue, des rythmes vibratoires aptes à susciter tel ou tel type de phénomènes, de manifestations, de métamorphoses ; dans la cornue ou le creuset d’une part, dans le psychisme de l’opérateur, d’autre part.
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Extrait de : Basile Valentin Le plus mystérieux des grands alchimistes du Moyen Âge, de Serge Hutin.

Paracelse 1493-1541

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C’est avec humilité que je vous partage cet article très complet sur Paracelse, n’étant pas suffisamment au fait de tous les éléments concernant la vie de ce Grand Homme pour pouvoir prendre moi-même la plume: http://www.science-et-magie.com/archiv…/…/5201paracelse.html

  • L’un des plus grands médecins de tous les temps

Paracelse (Théophraste Bombast von Hohenheim 1493-1541), l’un des plus grands médecins de tous les temps, naquit voici plus de 500 ans, le 10 novembre 1493, près d’Einsiedeln, en Suisse. Excepté Hippocrate, peu de praticiens laissèrent de monument comparable au sien.

Il eut pour amis quelques célébrités de la Renaissance, tel le grand humaniste Érasme ou l’éditeur Johann Froben.

Ambroise Paré et Giordano Bruno portèrent un vibrant hommage à son enseignement. Pourtant, il fut souvent incompris par ses contemporains, méprisé par les officiels, et les mandarins des Universités le traitèrent en charlatan. Sa vie de chercheur solitaire, à contre-courant des idées reçues, en fit un éternel contestataire, un errant.

Il utilisa la langue allemande commune plutôt que le latin dans ses écrits afin de rendre la science accessible au plus grand nombre. Basés sur l’expérimentation, ses travaux l’amènent à décrire et pratiquer l’homéopathie et le magnétisme deux siècles avant Hahnemann et Messmer.

Sa pharmacopée est l’une des premières, il invente l’asepsie, pressent la psychanalyse, découvre les maladies psychosomatiques. Toute sa vie il luttera contre les Diafoirus. Même s’il se complaît à l’étrange et aux extrêmes, tandis que les autres parlent et paradent, Paracelse, lui, guérit…

  • Jeunesse

Théophraste Bombast von Hohenheim, plus connu sous le nom de Paracelse, naît le 10 novembre 1493, près d’Einsiedeln (Suisse), où son père exerce la médecine. Il semble que Mme Hohenheim mourut peu après la naissance de son fils.

Cette mort prématurée touche profondément le jeune garçon qui gardera durant toute sa vie la nostalgie d’une mère trop tôt disparue. «Un enfant n’a besoin ni de constellation ni de planète. Sa mère est sa planète et son étoile.» dira-t-il plus tard.

Théophraste restera longtemps d’une nature fragile. Élevé par son père, qui lui communique son goût de l’étude et de l’observation, il court la campagne en sa compagnie, étudie les plantes et les minéraux dont les vertus, bien connues des paysans et des guérisseurs de l’époque, n’étaient pas encore codifiées. Nous sommes en pleine Renaissance et la première pharmacopée scientifique ne date que du XVIIIe siècle.

Le jeune Théophraste apprend donc la physique (du grec phusis, nature), dans le grand livre de la Nature, et découvre les rudiments de la médecine sous la houlette de son père.

  • L’adolescent

Lorsque son fils atteint l’âge de 9 ans, Wilhelm von Hohenheim quitte la Suisse pour s’établir dans la ville minière de Villach, en Carinthie (Tyrol autrichien), où il demeurera le restant de sa vie. Les mines de fer, de plomb, de cuivre des environs de Villach appartiennent aux Fugger, banquiers devenus puissants, qui prêtent aux papes et aux rois (Charles Quint qui leur doit son trône les fera Comtes d’ Empire).

Le docteur Hohenheim s’installe sur la place du Marché, donne des consultations et dispense des cours à l’École des Mines, tout en poursuivant des recherches alchimiques dans son petit laboratoire.

Théophraste va à l’école chez les Pères, sa santé s’améliore, et le gamin souffreteux se transforme en adolescent volontaire et sûr de lui. Il aime profondément l’étude et rendra plus tard hommage à ses maîtres qui, à côté de l’enseignement de la Bible, à laquelle il restera fidèle toute sa vie, entrouvriront pour lui la porte de la science et de la philosophie.

Au contact de son père, des ingénieurs des mines et des mineurs, le jeune homme acquiert des connaissances concrètes, un savoir pratique, auxquels il appliquera les raisonnements abstraits des effets et des causes appris à l’école.

C’est donc ici, en Carinthie, que le jeune Théophraste découvre, après celles des plantes, la valeur et la richesse des métaux, dont en habile expérimentateur il décèle les vertus thérapeutiques. On trouve en effet, dans la région, du minerai de plomb, de fer, de cuivre, de l’or et du zinc, alors très rare, sans compter l’alun, le vitriol, le cinabre ou le mercure.

Il est aux premières loges pour observer les techniques d’extraction du minerai, sa transformation, sa fonte. Il verra sous ses yeux se liquéfier l’or et le fer, il assistera à la composition des alliages. Et, en vrai fils d’alchimiste, Théophraste mettra la main à la pâte, manipulera lui-même les métaux.

  • L’alchimiste

Est-ce en dorant des pièces de métal qu’il rêvera de transmutation ? En ce temps là, la chimie ne s’était pas encore séparée de l’alchimie. Pourtant ce n’est pas cela qui l’intéresse. «L’alchimie ne consiste pas à faire de l’or et de l’argent, dira-t-il, son but est de produire les essences souveraines et de les employer pour guérir les maladies.» Il ira jusqu’à appeler les alchimistes qui cherchaient à fabriquer de l’or, des « imbéciles qui battent la paille vide. »

A Villach, Paracelse n’est encore qu’un adolescent, mais il a déjà l’intuition de son système futur : un système d’interaction, où tout se tient, où tout agit et réagit, le ciel, les étoiles, les signes, les éléments, l’homme et la matière.

Tout correspond, et l’intelligence consiste à retrouver le petit signe qui trahit l’union secrète de deux choses. Par exemple, l’une sera la maladie, l’autre le remède. Ce monde des correspondances est le fondement même de sa doctrine.

A Villach, Paracelse fut remarqué par Joachim von Wadt, le principal du collège, ami de son père et futur réformateur de St Gall. Nommé recteur à Vienne, von Wadt fit venir son protégé auprès de lui dès 1509, et c’est dans cette ville que Théophraste sera reçu au grade de « bachelier de médecine » (1511) seul diplôme qu’il ait jamais officiellement reçu. C’est à cette époque que, selon l’usage du temps, il décida de latiniser son nom, Hohenheim devenant Paracelse, appellation sous laquelle il passera à la postérité.

Mais autant l’enseignement primaire et secondaire lui plurent, autant, dans ses écrits, il avoue que l’enseignement traditionnel dispensé dans les universités, trop axé sur un savoir livresque, lui déplaît. Il prend en sainte horreur les scoliastes, ces « bonnets rouges », les mandarins rabâcheurs, qui tiennent le haut du pavé dans les universités d’alors.

Entièrement soumis aux règles de la scolastique, l’enseignement supérieur n’accordait aucune place à l’observation de la nature ou aux investigations de type expérimental. Aussi, déçu par ces « maîtres imbéciles », Paracelse alla chercher ailleurs un enseignement plus proche de son intelligence intuitive.

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  • L’initié

On prétend que Paracelse abandonna l’université pour devenir l’élève de l’Abbé Tritheim, à Wurzbourg *. On prétend également que l’influence de ce nouveau maître fut décisive dans l’élaboration de la doctrine de Paracelse.

Moine bénédictin, Tritheim avait réalisé une synthèse entre la Kabbale (tradition ésotérique juive), l’hermétisme (révélations du dieu Hermès dont alchimie et astrologie sont des disciplines majeures) et d’autres courants de pensée que l’église tenait pour hérétiques.

Le supplice de Savonarole, brûlé en 1498, montrait combien serait difficile la vie de ceux qui s’engageaient sur ces voies interdites. Or Tritheim, renouant avec la tradition gnostique et hermétique, affirmait l’unité du monde et la possibilité pour l’homme d’évoluer vers une spiritualité plus haute, doctrine en contradiction avec la notion chrétienne de péché originel, de jugement dernier et de damnation éternelle.

Imprégné de son enseignement, Paracelse quitte son maître en 1515, prêt à accomplir son destin. Il a 22 ans. Il va connaître une longue suite de voyages, parcourant l’Europe en tous sens, rencontrant les plus grands esprits de son temps.

Reconnu par ses pairs, souvent jalousé par les médiocres, il fut reçu par quelques grands de ce monde et des peintres célèbres firent son portrait en diverses villes qu’il visita.

  • Le voyageur

Il commence son périple par la cité minière de Schwatz, où il vérifie les propriétés thérapeutiques des métaux. « Il produit un corps en laboratoire, observe les conditions dans lesquelles il l’obtient, répète l’expérience.

Ensuite il essaie le médicament sur lui-même. Dans un dernier stade seulement, il réfléchit, essaie d’en tirer une théorie. » Il étudie des préparations de fer, de zinc, d’antimoine, de mercure et de plomb, utilisant le soufre et l’acide sulfurique dans ses amalgames. Le bismuth retient particulièrement son intérêt. Il en découvre certaines propriétés curatives encore utilisées de nos jours.

Parallèlement à cette démarche scientifique, il s’intéresse aussi à l’astrologie (dont l’astronomie ne s’est pas encore séparée), à la magie opératoire. Pour un esprit de notre temps la magie exclut la science. On est savant ou charlatan.

Mais à l’époque de Paracelse, la Science et la Magie, sont des connaissances de même ordre. La magie donne la raison des choses, comme la raison en dévoile la magie. Alors, ne nous étonnons pas que ce perpétuel chercheur effectue des incursions dans l’irrationnel, qu’il passe du réel à l’imaginaire, d’un plan purement terrestre à un plan « autre », comme s’il avait l’intuition d’une réalité cachée, imperceptible à nos cinq sens. C’est à ce titre que Paracelse peut être considéré comme un adepte de la médecine hermétique.

La rédaction de son premier ouvrage, l’Archidoxa, date de son séjour à Schwatz.

Puis il part pour l’Italie, soignant et herborisant en chemin, apprenant en autodidacte ou fréquentant les universités en auditeur libre. En 1516, l’année où Charles-Quint succède à Ferdinand d’Aragon, où Erasme publie son « Nouveau Testament », Thomas More « Utopia » et Machiavel « Le Prince », année aussi de la mort de l’abbé Tritheim, voici Paracelse à Ferrare. On a dit que ce fut dans cette ville qu’il reçut son diplôme de médecin. L’a-t-il jamais reçu ?

Sans que la preuve ne puisse en être apportée de manière formelle, il semblerait que Paracelse fût affilié à une de ces sociétés secrètes d’initiés qui couvraient l’Europe et facilitaient les voyages de leurs adeptes.

On prétendit même que ce furent les Fugger qui commanditèrent les voyages de Paracelse et ses visites aux « maîtres occultes » !

Lors de son passage à Genève durant l’hiver 1517, il guérit la fille d’un notable qui souffrait de surdité depuis sa naissance, par une simple « imposition des mains ». La rumeur de ce « miracle » s’étant répandu dans la ville, des dizaines de sourds l’assiégèrent dans la modeste auberge où il séjournait. Ce désordre mal vu des autorités genevoises, il fut prié de quitter la cité et fut contraint de gagner la Savoie.>

En 1517 il vint à Paris où il prendra connaissance des travaux des alchimistes et des médecins français. Ensuite il rejoint Montpellier où la Faculté restait influencée par la médecine arabe et le mouvement kabbaliste. Il y lit le Zohar. Il retourne en l’Italie, mais le climat intellectuel n’y est plus de son goût et il s’embarque pour l’Espagne avant de rejoindre Lisbonne.

  • Son but

Son but reste toujours d’améliorer ses connaissances et il ne cessera jamais d’étudier et d’expérimenter. Du Portugal, il prend la mer vers l’Angleterre. Apprenant qu’on se battait aux Pays-Bas, il obtient un poste de chirurgien-barbier dans l’armée hollandaise. Puis il contracte un autre engagement, au même titre, dans l’armée danoise.

Partout où il séjourne il ne manque pas d’étudier les traditions médicales populaires. Ainsi qu’il le mentionnera dans son livre De Defensiones: « Les Universités n’enseignent pas toutes choses; il faut au médecin rechercher les bonnes femmes, les bohémiens, les tribus errantes, les brigands et autres gens hors la loi, et se renseigner chez tous. Nous devons, par nous-mêmes, découvrir ce qui sert à la science, voyager, subir maintes aventures, et retenir en route ce qui peut être utile. » Il restera fidèle à ce programme jusqu’à la fin de sa vie.

En 1522 il est à Venise comme chirurgien militaire dans le cadre de la guerre qui oppose Charles-Quint et François Ier pour la possession de Naples. Il y acquiert une grande notoriété, ayant guéri « dix-huit princes abandonnés par leurs médecins ».

Il choisit le mauvais camp

En l’an 1524, Paracelse sera mêlé aux révoltes paysannes de l’Empire. Il soignera les plus malheureux. Mais il a choisi le mauvais camp, et il doit fuir. L’année suivante, il retourne une dernière fois auprès de son père, à Villach, avant de chercher à s’établir.

En 1526, le voici à Strasbourg, inscrit à la guilde de « La Lucerne ». Il soigne et guérit le margrave de Bade qui souffre de dysentrie chronique. Il y gagne une bague, mais aussi la jalousie de ses confrères qui l’accusent de sorcellerie, incitant le margrave à lui refuser les honoraires convenus. Il est furieux et le proclame.

  • Le professeur

Froben, le grand éditeur bâlois chez qui s’est retiré Erasme, appelle Paracelse à son chevet. Une de ses jambes paralysée ne répondant plus, les médecins officiels veulent l’amputer. Grâce à son art, Paracelse évite l’amputation et Froben retrouve l’usage partiel de ce membre.

Théophraste fait coup double en soignant les troubles hépatiques d’Erasme. Ses deux nouveaux amis lui proposent de s’installer à Bâle où le poste de médecin de la ville est vacant. Grâce à leur influence, Paracelse est nommé médecin municipal, poste important, car il comprend une chaire de médecine à l’Université et la surintendance des apothicaires.

En 1527, il commence son cours à l’université de Bâle, rejetant le décorum vestimentaire des professeurs du temps et l’usage du latin au profit de l’allemand. Dans le climat révolutionnaire de l’époque, l’accueil des étudiants est enthousiaste.

Paracelse confirme son rejet de l’enseignement rétrograde et sclérosé des anciens « pour étudier les maladies sur les malades et rechercher les remèdes dans la nature »

  • La tradition hermétique

Il rejette la philosophie scolastique qui répartit l’univers en catégories, montre Dieu et le Monde séparés, l’âme et le corps formant chez l’homme un dualisme irréductible. Il dira que: « toutes les choses ont été et sont venues d’Un, ainsi toutes les choses sont nées de cette Chose Unique par adaptation. ». Il s’agit d’intégrer l’homme dans l’univers car tout ce qui existe vit et possède une âme. Ainsi « Le Macrocosme et le Microcosme (l’homme) ne font qu’un. ».

Il inaugure l’étude de la pathologie de la nutrition en soulignant que notre corps absorbe les poisons joints aux aliments. Sous le nom de « maladies du « Tartre » il analyse la rétention des déchets qu’engendre une digestion incomplète. Il observe les intoxications d’origine respiratoire et insiste sur la nécessité d’aérer les chambres des malades et des hôpitaux.

Pour Paracelse, l’homme et l’univers sont unis par une synergie parfaite. Notre corps est formé d’éléments qui existent dans l’univers et l’interaction entre l’environnement et la créature est constante. Enfin notre entité spirituelle peut être sujette à l’influence de celle des autres hommes : la suggestion (hypnose) et la persuasion (envoûtement), sont de simples projections d’une volonté.

  • Les maladies mentales

Paracelse perçut clairement la nature des maladies mentales. Il étudia en particulier l’épilepsie (le « haut mal » du Moyen-Age), et rejeta toute influence diabolique dans leur apparition. Abordant l’étude de la psychiatrie, il distingue l’inconscient du conscient (qu’il désigne respectivement par le terme d’âme animale et d’âme spécifiquement humaine). Son insistance pour protéger les personnes atteintes de folie est proportionnelle à la dureté des moeurs du temps à leur égard (prison, tortures et bûcher sont monnaie courante).

Il indique la fonction cathartique (2) du rêve que Freud redécouvrira quatre siècles plus tard, mais soutient aussi l’existence de rêves prophétiques ou surnaturels.

Sa pratique thérapeutique consiste à s’en remettre avant tout à la nature. Il faut soumettre l’expérience au crible de la vérité. Mais on ne doit pas procéder de manière aveugle. La guérison est la résultante d’un processus naturel: le fluide vital. Après Hippocrate, Paracelse enseigne que « Les semblables guérissent les semblables… ».

Il suit la règle de similitude et, pour établir le lien entre un médicament donné et un certain état morbide, il développe la notion de « signature » (l’activité vitale des objets naturels ou leurs apparences demeure en relation étroite avec les particularités de chaque maladie). Il faudra attendre trois siècles et les travaux de Hahnemann pour voir cette notion se constituer en doctrine: l’homéopathie.

  • Le précurseur

Ce sont des considérations « magiques » analogues qui conduisent Paracelse à développer l’organothérapie (utilisation des organes animaux pour soigner certaines maladies des mêmes organes humains, technique aujourd’hui très à la mode). Il recommande le sérum sanguin pour contrer les hémorragies. Imprégné d’alchimie, il heurte les théories du temps en préconisant le premier l’usage de sels métalliques (que les médecins de son époque regardaient comme de dangereux poisons).

Il n’ignore pas l’importance du dosage, ni même de son aspect infinitésimal dont l’homéopathie fera le plus grand usage. Il est aussi le précurseur de la thérapeutique magnétique, utilisant l’aimant contre certaines maladies. Toutes ces découvertes nous autorisent à considérer Paracelse comme le plus grand novateur de l’histoire médicale occidentale.

Mais, si ses étudiants le suivent avec enthousiasme, Paracelse voit bientôt se dresser contre lui une puissante cabale animée par les médecins bâlois, qui le contraignent à l’exil. Il s’installe à Colmar en 1528, puis, un an plus tard à Esslingen où, en marge de ses consultations et de ses expérimentations médicales, il se livre à des travaux occultes. Médecin reconnu par ses pairs, Paracelse est également un ésotériste qui étudie et expérimente toutes les recettes possibles, entretenant des liens étroits avec les plus grands initiés de son temps. Il pratique toujours l’alchimie qu’il considère comme la médecine suprême, capable de rétablir la santé tout en opérant la transmutation spirituelle de l’être.

On prétend que ses travaux l’amenèrent très loin. Une belle légende voudrait qu’il ait découvert comment « redonner corps aux objets ayant perdu leur substance matérielle », et même réussi à créer un homuncule sans l’aide d’une matrice humaine !

  • Occultiste et prophète

Si l’expérimentation demeure pour Paracelse la seule méthode d’arracher les secrets de la nature physique, la Magie est le moyen de développer l’intuition spirituelle (clairvoyance) et d’agir sur le monde extérieur en faisant appel à d’autres énergies: « De même que le monde n’est qu’un produit de l’imagination de l’âme universelle, l’imagination de l’homme (qui est un petit univers) peut créer ses formes invisibles et celles-ci se matérialiser ».

Pour lui, les opérations de magie procèdent de forces naturelles: il va jusqu’à décrire dans les moindres détails le processus d’envoûtement avec figurine de cire, utilisation du lien de « sympathie » entre le sujet et son image.

Il va même jusqu’à supposer que nombre d’entités occultes généralement invisibles nous entourent, et que certaines modifications de notre sensibilité (par l’usage de drogues ou suite à la maladie) peuvent nous les rendre visibles sur un autre plan, qu’il appelle éthérique.

Il parle aussi de la possibilité d’évoquer les morts et de faire apparaître leur corps sidéral (et non l’intégralité de la personne). N’est-ce pas l’ectoplasme des Spirites ?

Dans ses traités philosphiques, il fait passer l’illumination avant la science, renouant ainsi avec la Gnose, doctrine reprise par les théosophes.

Imprégné de tradition ésotérique et professant la notion d’illumination directe, Paracelse ne prit guère parti dans la querelle entre catholiques et protestants. Il critiqua l’Église avec prudence, vitupérant l’ignorance de ses prêtres et le trafic des reliques, considérant que seul un saint peut, de son vivant, accomplir des miracles grâce à son pouvoir spirituel. S’il montra au début quelque sympathie à l’égard de la Réforme, il la qualifia vite de « ramassis de sectes ».

La mort de son père en 1534 le ramène à Villach où, après avoir réglé la succession, il reprend son errance sur les routes d’Europe, tout en continuant la rédaction de ses ouvrages. Le plus étrange reste ses «Pronostications», comparable, plusieurs décennies avant leur parution, aux Centuries de Nostradamus. Il y annonce entre autres la Révolution française et la chute de la monarchie absolue.

Suite à la publication de sa «Grande Chirurgie» dédiée au roi Ferdinand, Paracelse est reçu à la cour de Vienne avec tous les honneurs, en 1537.
La même année, il rencontrera fortuitement dans une auberge au cours d’un voyage, Jérôme Cardan avec qui il s’entretiendra durant plusieurs heures et dont il dira dans un de ses ouvrages qu’il fut l’un des plus éminents esprits de son temps.

Si la majeure partie de sa vie fut marquée par des persécutions, il connut malgré tout de son vivant, la gloire et la reconnaissance de ses pairs. Il meurt à Salzbourg le 24 septembre 1541 dans des circonstances restées obscures. Enterré avec les honneurs, il le sera, selon ses voeux, dans le cimetière des pauvres de cette ville.

  • Une œuvre immense

Ce jour-là, le Bouddha, ayant réuni un grand nombre de ses disciples sur le Pic des Vautours, près de Rajagriha, ne prononça pas un mot, mais se contenta de montrer une fleur qu’il tenait entre ses doigts. Personne ne comprit le sens de ce geste, sauf Mahâkasyapa qui sourit.

Il fut de ceux qui établirent le lien entre les mystères de l’antiquité, les ordres secrets et les confréries du Moyen âge, dans le sens d’une compréhension occulte du monde. Selon l’opinion d’un de ses biographes: « Son oeuvre constitue encore la plus vaste synthèse philosophique, religieuse, sociale, médicale et scientifique jamais réalisée par un esprit humain. » (Dr. Allendy). Si Paracelse eut peu de disciples, il inspira jusqu’à nos jours de nombreux chercheurs. D’une certaine manière il est toujours vivant et se révèle, par delà les siècles et le nouvel obscurantisme des orthodoxies scientifiques, le véritable prophète du Nouvel-Age.

Documentation : André Jimenez
NOTES

(1) A cette époque, les chimistes étaient encore alchimistes. Leurs analyses et leurs combinaisons appartenaient aux traditions occultes. Ils cherchaient les secrets de la nature avec des rites magiques, observant les jours et les heures propices, les influences astrales, faisant usage d’invocations, de signes cabalistiques, se préparant à leurs expériences par le jeûne, la méditation et la prière.

(2) A l’exception d’une seule allusion où Paracelse traite l’abbé Tritheim de « chercheur faustien », ce qui n’est pas une preuve d’admiration, il n’a jamais fait mention dans son oeuvre de ce séjour, ni de l’enseignement supposé reçu de la part du célèbre occultiste. Mais cela ne saurait démontrer qu’il ne l’ait jamais rencontré.

(3) Méthode thérapeutique induisant une crise émotionnelle artificielle qui résoudra le problème de l’intérieur. (Gestalt)

Ce qu’il a dit

L’homme propose mais c’est dieu qui guérit. Dieu ne fait rien sans l’homme S’il opère un miracle Il le fait à travers l’homme qui n’est qu’un canal.
Tout ce qu’il y a dans les livres a moins de valeur que l’expérience d’un seul médecin qui pense et qui raisonne. (Citation de Rhazès reprise à son compte par Paracelse)
L’homme a en lui une force magnétique sans laquelle il ne peut exister.
Pour en savoir plus

Dr René Allendy : Paracelse, le médecin maudit (Dervy)
Guy Bechtel : Paracelse (Tchou)
Pierre Genève : Paracelse mage et médecin (Euredif 1972 )
Anna M. Soddart : La Vie de Paracelse (Maloine)
Béatrice Whiteside et Serge Hutin : L’homme, le médecin, l’alchimiste (La Table Ronde)

http://www.universalis.fr/encyclopedie/paracelse/
http://medarus.org/Medecins/MedecinsTextes/paracelse.html

 

Citation de Frère Basile Valentin dans ses 12 clefs de philosophie

Frère Basile Valentin : Les douze clefs de philosophie, traduction françoise à Paris chez Pierre Moët Libraire 1660 (cette traduction n’est pas celle usitée par Canseliet et comporte des fautes de grammaire que je laisse)

« Fait que ce qui est dessus soit dessous, que le visible soit invisible, le corporel incorporel, et fait derechef que ce qui est dessous soit dessus, l’invisible rendu visible, et l’incorporel corporel, et de cela dépend entièrement toute la perfection de l’art, où néanmoins habite la mort et la vie, la génération et corruption : c’est une boule ronde où se tourne l’inconstance roue de fortune, et apporte aux hommes divins toute sagesse et bonheur, l’on l’appelle de son propre nom toute chose ; Dieu toutefois est souverain, et a seul commandement sur les choses éternelles. »

 

basile-valentin

Vidéo « Introduction à l’Alchimie par les Sept Sceaux »

Trouvée par hasard, cette petite vidéo nous présente, sur un ton décalé et humoristique, l’Alchimie d’une façon claire et rafraîchissante. Il y a mille façons de présenter notre Science en 12 minutes et celle-ci n’est pas parfaite (aucune ne le serait) mais je la trouve assez complète et bien menée. Je trouve que ce genre de vidéo « jeune » nous sort un peu du cadre guindé et sclérosé que l’on retrouve souvent. Libre d’aimer ou de réprouver .